samedi 18 novembre 2023

dimanche 22 novembre 2020

Quimperte quoi...

 

Un étrange rictus s'était saisi de mes lèvres.Il devait s'y plaire et avait décidé d'y rester.

Ma lèvre supérieure s'était rabattu sur celle du dessous à l'image d' un bec.On ne m'aurait pas prêté pour autant une expression de tristesse, juste un air las et hagard.

J'étais en froid avec le bonheur depuis quelques temps c'est vrai.Il m'avait posé plusieurs lapins et j'avais juré de ne plus jamais le revoir.On s'était pourtant donné une deuxième chance ici, au pays de la crêpe et des connards.

Je caressais le chat sur mes genoux qui attendait que je relâche mon étreinte pour aller ne rien faire ailleurs.Je pressais sa truffe humide et froide qui avait l'air de fondre comme un glaçon en oubliant qu'il avait flairé son étron dans son bac cinq minutes avant.

Il était con ce chat.Pas calin pour un sou, mais on pouvait en faire ce qu'on voulait.Sa patience sans limites m'impressionnait.Il aurait eu sa place sous le portique stoïcien sous la toge de Zénon.

Désormais loin du tumulte de la ville dans ce trou provincial, une sorte d'angoisse m'assalliait à l'idée de ne plus pouvoir faire machine arrière.Car ce calme violent me cassait les oreilles parfois et me mettait hors de moi.Je devais me rendre à la terrible évidence:La ville, la vraie, celle qui sent le pipi rance, me manquait.

Comme je m'emmerdais sévère je décidais d'aller voir s'il y avait du courrier dans la boîte.Du vrai en papier, pas des mails.

Dans l'escalier je fis aussitôt demi-tour car dans l'entrée, la plume de pigeon n'avait pas bougé.Elle était là depuis une bonne semaine.Une éternité.Lorsque celle-ci avait changé de place, elle annonçait que le facteur était entré et avait remué l'air de ses gros gestes.J'en déduisais qu'il y avait peut-être du courrier.Mais La licorne de l'enfant commandée sur le bon coin n'était pas arrivée.J'en informais sans tarder le service client avant d'aller skater.


Les sess dans ce gros village moussu se déroulaient ainsi  :

Serrage de vis.Petite marche de cinq minutes pour sortir du quartier historique napé de pavés bombés impratiquables.

Arrivée en haut de la rue du Pichéry.Une descente un peu flippante assez courte avec à l'arrivée une rue pavée perpendiculaire fréquentée.Je tergiverse sur quelques mètres, chaud?Pas chaud?La prendre, c'est d'abord checker dans le dos qu'une Picasso ne surgisse et y aller.Pour les néophytes, une descente se prend ou ne se prend pas.Une fois lancé, on s'arrête pas, on attend la fin en serrant les fesses en évitant le "speed wobble", cet effet de physique qui se traduit par une accumulation de force due aux vibrations des trucks résultant d'une perte de contrôle.Chute inévitable.

Finalement, j'ai les fois et je descends à pieds.Car je suis raide comme un bouc.

Une fois en bas, en faisant un petit effort, on se croirait presque en ville, l'environnement se fait un poil plus urbain hormis les trottoir merdiques de type médiévial.

Enfin, trois-cent mètres plus loin, le bitume devient correct et on peut rouler.C'est le grand parking dit de Glacière, chef-d'oeuvre de la marré-chaussée  qui accueille les touristes en été et le marché le samedi.Délice asphaltique ça roule, enfin  !

Au bout du parking, se dessine le spot.L'unique structure skatable du patelin.L'édifice dont je dois me contenter est mal branlé mais on s'en accomode en dépis d'un revêtement fait d'un mélange de ciment, de sable de mer et de petits coquillages très mignons.Une riche idée de vouloir imiter la texture de la toile Emeri pour la pratique du skateboard.La rumeur dit que le gars qui l'a designé l'aurait fait exprès dans le machiavélique dessein de rameuter les jeunes dans son park privé.C'est plausible.Les bretons ça ose tout...Ce subtile mélange merdeux et sa rugosité en font un véritable instrument de torture tant pour les sept couches d'érable que le derme.On a pas envie de tomber là dessus.On a pas envie de skater tout court d'ailleurs puisque skater c'est tomber.

Mais je reste, je skate pépère.Dans ma tête c'est une 411, en vrai c'est Soir 3.Je croise crevards et vielles dames traînant des petits chiens qui caguent hâtés par mémé.Après une bonne suée et un drainage salvateur d'agressivité, je rentre.J'ai perdu un kilo ou plutôt un litre que je récupère aussi sec à base de Badoit tiède car j'ai oublié de mettre la bouteille au frais en partant.Je suis vidé et quelque peu calmé mais aussi un peu ruiné surtout au niveau des tibias.La marque de celui qui rate.

Je fais un rapide débrief de la sess dont la conclusion n'est pas glorieuse.Pourquoi je décolle plus putain!Où qu'il est le pop?Et cette jambe arrière qui pèse une tonne...Ingratitude d'une passion de trente ans.

Pour l'adolescent fripé que je suis, rien ne sert de mourir,il faut pourrir à point.Alors je m'étire comme j'ai vu sur Youtioube pendant trois au moins trois minutes.Puis quand je passe devant le mirroir de la salle de bain, je remarque que j'ai des rides à la jonction de la joue et l'oreille.Et des touffes de poils récalcitrantes se dressent à l'orée du pavillon.Je dois les épiler car ça fait pécore.Je ne m'attendais pas à commencer à vieillir à cet endroit.Là au dessus du lobe...Cela commence souvent par des verrues et des poils m'avait t'on dit.

Je terminais une éval négative sur Trip Advisor d'un snack foireux que j'avais expérimenté à mon arrivée.Une sorte de Cyber café très « 2000 » avec quinze ans de retard et qui propose en plus de l'ADSL des plats vitrifiés de type Tricatel qui ferait passer Flunch pour la Tour d'Argent.

Ca finissait comme ça: " Malgré une cuisine de qualité industrielle et un accueil un peu frisquet, les encas proposés restent tout à fait mangeables.Petit bémol pour les prestations internet mise en avant dans ce commerce car si le débit de boisson est absent, celui du net l'est aussi..."

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On l'aura compris, mon bled, c'est pas Huntington Beach...Ca roule pas ici et l'absence de spots fait qu'un skater digne de ce nom se retrouve rapidement proche de l'anémie.

Ayant compris mon triste sort et devant faire avec, je pris le problème à bras le corps et décida de passer à l'attaque.J'eus d'abord l'ambition de créer mes propres spots.Le DIY est à la mode, on en voit partout sur le net alors pourquoi pas?Je me ravisais fissah tant lidée de manier la truelle sur un parking me décourageait.Et puis je m'imaginais chez Casto à choper des parpaings et du ciment.Bof...




Slavery Follower

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